La réponse est simple : le “Reiki tibétain” n’a aucune authenticité, ni du point de vue historique, ni même du point de vue culturel… car il s’agit en fait d’une création américaine des années 1980 !
Quand on sait que plus de la moitié des pratiquants de Reiki dans le monde (si ce n’est les 3/4) ont reçu des enseignements du pseudo “Reiki tibétain” (notamment via les courants occidentalisés et New Age issus des livres et séminaires de Diane Stein et William Lee Rand), il n’est pas sans intérêt de rappeler certains éléments, qui permettront à tout un chacun de statuer, désormais en connaissance de cause, sur l’intérêt ou non de ces pratiques…
Étendons-nous quelques instants sur le cas emblématique de ce pseudo “Reiki tibétain” ; il est en effet typique des affres et des dérives commerciales et fantaisistes (“New Age”) qu’a pu connaitre le Reiki Usui. Il est d’ailleurs, malheureusement, à l’origine d’un grand nombre d’autres courants récents, qui sont venus recouvrir et masquer le Reiki Usui originel et son essence spirituelle, pour les transformer apparemment en une pratique magique (égrégores et entités) ou de magnétisme (donner son énergie et faire des “passes”)… ce que le Reiki Usui n’est pas du tout !
La naissance du pseudo “Reiki Tibétain” : les États-Unis des années 1980…
C’est ainsi que le pseudo “Reiki tibétain” a été inventé par l’américain Arthur Robertson vers 1984, à une époque où la transmission du Reiki était encore assez restreinte et sélective financièrement.
En inventant son propre style de Reiki (Raku Kei), avec ses ajouts personnels, il était libre de faire ce qu’il voulait et c’est aussi lui qui démocratisera fortement le prix des initiations au Reiki, notamment celle du 3ème Degré qu’il fera passer de 10000$ à 1500$ ; ce sera d’ailleurs là une raison majeure de la diffusion très importante du Reiki via ce “courant pseudo-ancien et bon marché”.
Parmi les noms connus s’étant abreuvés largement à la source du Raku Kei de Robertson, on citera par exemple Diane Stein et William Lee Rand (ce dernier créera d’ailleurs à son tour, régulièrement, de nouveaux styles de Reiki, comme autant de modes à lancer et à exploiter)… Ils seront les deux grands diffuseurs de cette forme de “Reiki”, mais ne feront plus trop étalage de sa source réelle (sans toutefois la dissimuler si l’on cherche un peu), ce qui leur permettra, à leur tour, de faire évoluer ce qu’ils avaient reçu et d’instituer ce qui deviendra le fameux “Reiki tibétain“… forgé par 3 américains, n’ayant aucune connaissance ou pratique réelle des choses tibétaines. Mais pourquoi s’embarrasser de si peu, si ça se vend bien, notamment parce que les week-end d’initiations sont beaucoup moins chers ? Vous imaginez aisément que cet argument commercial, au détriment de la vérité, de la qualité et de l’efficacité spirituelle n’est guère pour nous séduire…
Cependant, comprenez bien : c’est finalement le “Reiki tibétain” qui a sorti le Reiki Usui des pratiques discrètes, en lui substituant un nouveau produit assez marketing et au succès indéniable… ce qui a contribué à l’envie de retrouver ce Reiki Usui originel “d’avant le Reiki Tibétain” et même “d’avant le Raku Kei de Robertson”, et ainsi permis de le sauver de l’oubli. C’est là que les lignées deviennent importantes, tout simplement pour donner au chercheur les indices qui lui permettent de savoir où chercher le contenu le plus authentique.
Ce “Reiki Tibétain” a-t-il le moindre rapport réel avec le Tibet et le bouddhisme tibétain ?
Il est manifeste que “l’exotisme tibétain” (l’inconnu qui allait avec, notamment du fait de l’éloignement géographique et culturel) a permis à l’époque de faire rêver aux fantaisies les plus grandes en se faisant passer pour le dépositaire d’une “tradition cachée” et inconnue du grand public ; il est sûr que Robertson était évidemment bien le seul à connaître une telle forme de Reiki, puisqu’il l’a crée de toute pièce à partir de bribes de traditions tibétaines, assemblées avec d’autres éléments (dont des dessins à la Max Escher), à la manière d’un Frankenstein. À sa décharge, il a mélangé ses fantaisies personnelles avec du vrai Reiki, qu’il a reçu d’Iris Ishikuro, l’un des 22 “Maîtres Reiki” formé par Takata… et qui ignorait tout des ces aspects “tibétains”. Quand on connaît le Reiki Usui authentique, on s’y retrouve, mais il est difficile de procéder dans l’autre sens et de retrouver ce qui est authentique au sein de ce qui est “mélangé”.
En tout état de cause, les éléments inventés par Robertson (notamment des symboles additionnels) n’existent qu’en “Reiki tibétain” et pas au Tibet (et encore moins avec les noms pas du tout tibétains dont ils ont été affublés), même si des symboles comme le DM ou le NGZ ressemblent un peu à d’autres choses existant réellement au Tibet. Aucune des pratiques du “Reiki tibétain” n’a de rapport ni avec les doctrines, ni avec les pratiques du bouddhisme tibétain, notamment dans leurs méditations. Ainsi si l’on vous vend de la méditation tibétaine en Reiki, elle est sans doute très bien et intéressante pour elle-même… mais n’a strictement rien à voir avec le Reiki : il est alors plus sage de ne plus appeler la pratique correspondante Reiki, et encore moins de la faire passer pour “traditionnelle”… Est-ce qu’il vous viendrait à l’idée de rajouter des épices tibétaines sur vos sushis et de les faire passer pour “traditionnels” ? Il faut dire que les américains rajoutent bien du ketchup partout et que cette habitude s’est diffusée, même en France…
Le Reiki Usui a-t-il le moindre lien avec le Tibet ?
Soyons très clairs : le Reiki Usui n’a aucun rapport direct, même assez lointain, avec le Tibet et toutes les archives historiques l’indiquent clairement… On n’a d’ailleurs pas la moindre trace de tels éléments dans le Reiki qui a fuité de la Gakkai ou dans celui issus des courants japonais authentiquement traditionnels.
Si nous avons donné des éléments d’explications qui permettent de comprendre que le pseudo “Reiki Tibétain” n’est ni tibétain, ni Reiki, n’y aurait-il pas quand même un lien entre le Reiki et le Tibet ? Cela ferait tellement plus joli de rattacher le Reiki à une autre grande tradition multi-séculaire… mais ça n’a aucun sens, ni aucune réalité historique : le Reiki Usui commence au Japon en mars 1922, par l’expérience personnelle d’un japonais nommé Mikao Usui. Certains disent d’ailleurs que cette pratique quasi-centenaire est “jeune” et, d’une certaine façon, cela n’est pas faux… mais dans ce cas que penser de pratiques inventées ou crées dans les années 1980-1990 (comme le Raku Kei de Robertson), quand ça n’est pas dans les années 2000, voire 2010 ?
Le Reiki Usui est seulement en rapport direct avec le Japon et, de ce fait, avec les influences chinoises importantes qu’il a connu, notamment liées au bouddhisme de la Terre Pure… mais pas du tout au bouddhisme tibétain, avec lequel il n’y a pas de connexion particulière, sauf assez lointaine par le bouddhisme Tendai, un bouddhisme ésotérique issu de Chine : le bouddhisme tibétain est effectivement lui aussi un bouddhisme ésotérique… mais la comparaison s’arrête là. Allez dire à un japonais ou un chinois qu’il est tibétain, je sens que vous découvrirez rapidement le sens du mot “approximation” ! D’ailleurs, le concept même de Reiki n’existe pas tel quel en tibétain : le concept source est chinois (靈氣/灵气, língqì)… ce qui permet de comprendre pourquoi il y a tant de parenté entre le Reiki (靈氣)et le Qìgōng (氣功).
Le Japon est le pays de naissance du Reiki de Mikao Usui, qu’il a formalisé et transmis durant environ 4 ans seulement… et en utilisant également une base Shintô visible, qui elle est encore plus évidemment “non tibétaine”, puisque spécifique au seul Japon ! Contrairement au pseudo “Reiki tibétain”, la destination première du Reiki Usui n’était d’ailleurs pas du tout de “s’exporter”, même si les vicissitudes de l’histoire en ont décidé autrement… ce qui fut une chance pour le reste du monde !
La chance fut moindre quand des formes inventées ont fini par recouvrir et cacher les formes originelles, en se faisant passer pour elles… ce qui est une belle escroquerie. Cette forme d’usurpation d’identité est cependant récurrente dans de nombreux aspects de l’histoire mondiale, et pas seulement en Reiki.
La vertu cachée de cette forme de tromperie (“à quelque chose malheur est bon“) fut aussi de frustrer tellement d’authentiques chercheurs ayant perçu des incohérences et manquements qu’ils ont finalement consacré énormément d’énergie à pister la source… jusqu’à s’en approcher aussi près que possible. Une démarche somme toute parfaitement Reiki : la vie est un chemin spirituel permettant l’élévation graduelle de notre Esprit, en ouvrant notre Cœur, et donc en laissant tomber tous nos préjugés afin d’accueillir plus de lumière.
En conclusion : le pseudo “Reiki tibétain” n’est que la plus célèbre des formes occidentalisées du Reiki, avec ses rajouts typiques du New Age, mais tout n’est pas à jeter dedans. Nous avons fait le choix de garder certains aspects bien choisis du “Reiki tibétain” dans nos enseignements… parce qu’ils ont une efficacité réelle et qu’ils donnent des “techniques complémentaires reiki-compatibles” qui peuvent s’avérer utiles : elles constituent des extensions modernes du Reiki, même si elles ne sont clairement plus du Reiki Usui. Chercher, c’est savoir séparer le bon grain de l’ivraie (et savoir expliquer la différence…) et ne pas jeter le bébé avec l’eau du bain (il y a parfois du bon, même dans les inventions apparemment les plus inauthentiques et loufoques).